« La dette que nous léguons à nos enfants »

La dette que nous léguons à nos enfants
Une chronique récente de J. Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, apporte des arguments très pertinents à ce débat sur la dette. En effet, face à l’instrumentalisation de cet argument pour imposer une réduction des dépenses publiques, notamment dans le domaine de la protection sociale, il indique que « la dette financière et la dette environnementale obéissent à des logiques différentes, ce qui devrait nous conduire à mieux considérer la nécessité d’investissements publics d’ampleur en faveur de la transition écologique ».

Si j’aborde cette question dans ma chronique santé, c’est parce qu’elle impacte ce qu’on appelle le capital physique et humain, c’est-à-dire notre santé. Il s’agit plus simplement de mettre en avant la valeur de notre environnement, des ressources en eau, de l’air que nous respirons ainsi que des sols. Stiglitz souligne que « si notre air et notre eau sont pollués, et nos sols contaminés, alors nous léguons effectivement une charge plus lourde à nos enfants ».

Il insiste en expliquant que la dette financière est un système de morceaux de papier qui en cas de défaut n’a aucune influence sur notre capital physique, humain et naturel. Dans ce contexte, il faut rappeler que les gains en santé, donc en espérance de vie, sont liés à 80 % à l’amélioration de nos conditions de vie, notamment la qualité de l’eau et une nourriture en quantité suffisante et de bonne qualité, et que seuls 20 % sont liés aux progrès de la médecine. Aux Etats-Unis dont Stiglitz est citoyen et qu’il connaît bien, la conjonction d’un système de santé défaillant et d’une dégradation des conditions de vie de la population a déjà des conséquences avec une diminution constante de l’espérance de vie depuis 2014. La pollution de l’air provoque une très nette augmentation des pathologies pulmonaires dans les zones urbaines où, faut-il le rappeler, vit à ce jour une majorité de la population mondiale. L’accumulation de polluants dits éternels dans les nappes phréatiques est aujourd’hui une réalité, sans parler des perturbateurs endocriniens en rapport avec une explosion de la mise sur le marché de nouveaux produits chimiques sans aucun contrôle au préalable de leur toxicité. Enfin, le changement climatique est à l’origine chaque année de canicules et autres catastrophes (incendies, inondations, sécheresses, etc.) aux coûts humains de plus en plus importants. Ces dégâts nécessiteront plusieurs décennies pour être réparés, car il ne s’agit pas de lignes de crédits qui peuvent être effacées par une opération de bourse ou la décision d’une banque centrale. La priorité n’est donc pas la dette financière contrôlée par les fameux 1 % qui possèdent près de la moitié de la fortune mondiale et s’accaparent les médias pour distiller leur message visant à culpabiliser les populations et s’exonérer de leurs responsabilités. L’urgence est à stopper la dette issue des dégâts causés sur l’environnement qui nous impactent déjà et impacteront encore plus le bien-être et la santé des générations futures.

Dr Christophe PRUDHOMME

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